La semaine dernière, une conférence s’est tenue pour annoncer les quatre chefs / cheffes de file pour La France Insoumise à Montpellier. Comment s’est déroulé ce processus, d’abord au sein des deux assemblées générales, puis pour la désignation des noms ?
Alors, nous, à la France Insoumise, on suit un processus défini au niveau national. Un calendrier a été mis en place pour désigner les chefs de file chargés d’animer les campagnes dans les différentes communes de France. Nous avons organisé une première assemblée municipale, qui avait pour objectif de définir un texte d’orientation stratégique locale. L’idée était de fixer les grandes lignes de notre action à Montpellier, nos aspirations, nos priorités pour ces élections municipales, et ce, avec les militants et militantes locaux. À Montpellier, notre organisation est territorialisée par quartier. Ce sont donc les militantes et militants actifs dans ces quartiers qui ont participé à cette première assemblée. La deuxième assemblée, elle, avait pour but de désigner les co-chefs de file, c’est-à-dire les personnes chargées d’animer la campagne jusqu’aux élections municipales. Ce n’est pas un cas unique, en fait. D’autres villes ont également fait le choix d’avoir quatre chefs de file. C’est une démarche qui vise à garantir une représentation plus large et à rassembler un maximum de forces militantes autour d’un projet commun. Dans notre cas, chaque co-chef de file a une importance particulière. Par exemple, moi, j’incarne la volonté de représenter la jeunesse dans cette campagne. On constate qu’il y a très peu de jeunes candidats et candidates aux élections municipales, surtout dans les grandes villes comme Montpellier. C’est important d’avoir cette représentation-là.
Le fait d’être quatre, était-ce prévu dès le départ ou c’est le fruit d’un compromis, peut-être parce qu’il était difficile de choisir une ou deux personnes ?
C’est un processus qui a pris du temps, car il y a eu beaucoup de discussions. On fonctionne par consensus, ce qui signifie qu’on prend le temps d’échanger, de débattre, pour aboutir à une solution partagée. Avoir quatre co-chefs de file nous a semblé être la meilleure solution pour rassembler tout le monde et envoyer un message fort d’unité à Montpellier.
Et maintenant que les quatre chefs / cheffes de file sont désignés, comment allez-vous organiser la campagne ? Est-ce que chacun aura un rôle précis ?
On est encore au début du quatuor. Le calendrier de la France Insoumise prévoit la désignation de la tête de liste en septembre. D’ici là, pendant l’été, notre travail va surtout consister à élaborer le programme : définir les axes prioritaires, identifier les thématiques importantes pour Montpellier. On travaille collectivement sur ces questions-là, puis en septembre, viendra le temps de la désignation de la tête de liste, conformément au calendrier national.
Concernant la communication, le fait d’avoir quatre visages peut-il troubler les électeurs ? Est-ce qu’il n’y a pas un risque de confusion pour certains ?
Nous, à la France Insoumise, on a toujours mis le programme au cœur de tout. Ce qu’on veut présenter à la rentrée, c’est un projet clair, auquel les électeurs pourront s’identifier. Ce qui compte, c’est ce que l’on propose concrètement, pas seulement l’image ou le nom d’une tête de liste. Notre objectif, c’est de construire une véritable alternative à la politique menée aujourd’hui par Michaël Delafosse.
Justement, en parlant des élections municipales, envisagez-vous des alliances ?
Notre liste est ouverte aux syndicats, aux associations, et à toutes les personnes qui se reconnaîtront dans le programme que nous allons proposer. C’est toujours comme ça que nous avons fonctionné : ce qui prime, c’est le programme. Par exemple, avec les écologistes, nous partageons des combats communs sur certains grands projets comme le LIEN ou le COM, que nous considérons comme des grands projets routiers inutiles.
Quel est votre regard sur la politique menée par Michaël Delafosse ?
La politique de Michaël Delafosse est dans la continuité de celle d’Emmanuel Macron. Sur Montpellier, la crise du logement est sévère. Chaque année, des étudiants se retrouvent à la rue, et la politique locale n’est pas à la hauteur. Quand les syndicats étudiants se sont mobilisés contre l’augmentation des loyers dans les résidences universitaires, Michaël Delafosse s’est positionné en faveur de cette hausse. C’est un désaccord majeur. Et ce n’est pas seulement une question de jeunesse : les quartiers populaires aussi sont délaissés. La semaine dernière, une coupure d’électricité a touché le quartier Saint-Martin dès 14h, sans qu’aucune annonce ni mesure ne soit prise. Si cela s’était produit dans un quartier du centre-ville, la réaction aurait été immédiate.
Ce que vous lui reprochez, c’est une politique trop centrée sur le centre-ville au détriment des autres quartiers ?
Exactement. C’est un maire de la Comédie. Oui, on voit des rénovations, des fontaines à l’Esplanade, ce sont des îlots de fraîcheur. C’est bien. Mais pendant l’épisode de canicule qu’on vient de traverser, dans les quartiers où les logements sont des bouilloires thermiques, rien n’a été mis en place. Ouvrir gratuitement les piscines, par exemple, aurait été un geste simple et utile pour les habitants. Il n’y a eu aucune mesure. Même dans les écoles, la chaleur est insupportable. On a été, avec une association de parents d’élèves, devant la mairie pendant la canicule pour dénoncer des températures dépassant les 30°C dans certaines classes.
Un autre sujet qui a fait polémique récemment : la déclaration de Mathilde Panot sur le désarmement de la police municipale et la vidéosurveillance. Quelle est votre position à ce sujet ?
Ce que nous souhaitons, c’est que la sécurité reste une compétence de la police nationale, et non de la police municipale. Nous sommes favorables au désarmement de la police municipale, et au retour d’une véritable police de proximité, avec un dialogue avec les habitants. Les communes développent ainsi des polices municipales armées et multiplient la vidéosurveillance : des dispositifs répressifs et liberticides qui ont démontré leur inefficacité. Prenons l’exemple du maire insoumis de Faches-Thumesnil, qui a désarmé sa police municipale sans que cela n’entraîne une hausse de la délinquance. Au contraire, on voit souvent que plus une police est surarmée, plus les tensions augmentent. Nous voulons porter un programme qui privilégie la présence humaine, avec la police municipale, de la médiation et de l’éducation spécialisée plutôt que la vidéosurveillance coûteuse, liberticide et démagogique. Ce n’est pas parce qu’il y a des caméras qu’il y aura moins de criminalité. Ce qu’il faut, c’est recréer de la présence humaine sur le terrain, du lien avec la population, et redonner confiance dans les institutions, plutôt que de multiplier des dispositifs sécuritaires inefficaces et coûteux comme la vidéosurveillance.
Et sur la situation des étudiants à Montpellier, quelle critique adressez-vous à la gestion actuelle ? Et que proposez-vous ?
La crise du logement étudiant est très forte. Il y a un déséquilibre énorme entre le nombre d’étudiants et l’offre de logements publics. On laisse les promoteurs privés s’accaparer le marché sous couvert de « logements étudiants », ce qui n’aide en rien à sortir les jeunes de la précarité. Nous, ce que nous proposons, c’est de prioriser les logements CROUS, de redonner du foncier aux CROUS pour construire, et de refuser toute augmentation des loyers en résidence universitaire. Un autre problème que nous avons constaté c’est la tarification des parkings autour des universités. Beaucoup d’étudiants vivent loin faute de logement, et sont obligés de venir en voiture car les transports en commun ne couvrent pas bien l’ensemble de la ville. On leur impose donc des frais supplémentaires. C’est une mesure précarisante. Enfin, il faut aussi soutenir les associations étudiantes, notamment via la distribution alimentaire. Il faut leur donner les moyens de continuer.
Parlons de la gratuité des transports à Montpellier, qu’en pensez-vous ?
La gratuité est une bonne chose, bien sûr. En tant qu’étudiante, ça fait une dépense de moins. Mais le problème, c’est la qualité du service. Dans certains quartiers comme Saint-Martin, les trams ne passent que toutes les dix minutes. Quand on rate un tram de quelques secondes, il faut attendre longtemps, ce qui est problématique, surtout en période de forte chaleur. Il y a régulièrement des perturbations, avec des temps d’attente de 15 à 20 minutes, même en pleine journée. Donc oui, la gratuité est positive, mais elle ne doit pas masquer les défaillances du réseau. Ce sont les habitants des quartiers populaires qui sont les plus touchés.
Comment vous positionnez-vous sur la question de la mise en place des ZFE (zones à faibles émissions) qui a fait débat ?
Nous demandons un moratoire sur les ZFE. On ne peut pas interdire aux gens de prendre leur voiture si l’offre de transports en commun n’est pas suffisante. Il faut d’abord un maillage efficace du territoire. Il y a aussi un manque de concertation. Je pense au collectif des Quatre Boulevards, qui subit les conséquences de travaux mal planifiés et non discutés avec les riverains. Les voitures et les embouteillages ont été déplacés sous leurs fenêtres, sans qu’ils aient été consultés.
Le prochaine étape pour vous elle est en septembre avec la désignation de la tête de liste ?
Oui, c’est la prochaine grande échéance. En attendant, tout l’été sera consacré à la construction du programme, en lien avec les militants, les habitants, et les outils que la France Insoumise met à disposition. Nous allons réfléchir aux priorités, aux urgences locales, à ce qu’on peut concrètement mettre en œuvre à l’échelle de Montpellier.