Vice-président au Conseil départemental du Gard, élu d’opposition à la Ville et à l’Agglomération de Nîmes, Vincent Bouget revient sur les dossiers qui font débat.
InfOccitanie : La façade de la Halle des sports de Nîmes a dernièrement été dévoilée, un équipement estimé à 25M€, réunissant onze disciplines sportives. Que vous inspire ce projet livré en septembre prochain ?
Vincent Bouget : C’est une bonne chose pour les associations sportives nîmoises qui bénéficiaient des salles du stade des Costières et qui seront relogées dans un équipement neuf. Nous manquons d’équipements sportifs à Nîmes, et certains mériteraient une rénovation. Je suis plus réservé sur la localisation car la Halle est bien moins accessible que le stade des Costières, notamment en transports en commun. Et il faut mesurer le coût d’un tel équipement, bien supérieur à celui qui était prévu, auquel il faut rajouter le coût de la rénovation de l’espace création.
Lors d’un conseil communautaire, Franck Proust, président de Nîmes Métropole, ne vous a pas épargné : « M. Bouget est sponsorisé par Kleenex, quand je l’écoute, il n’y a rien de positif. Ça devient ridicule ! ». L’opposition de gauche à l’Agglo bascule-t-elle dans une caricature imprégnée du défaitisme ?
M. Proust devrait parfois utiliser un Kleenex pour essuyer ses lunettes, regarder et dire la réalité telle qu’elle est. Nous sommes une opposition sérieuse et sincère. Nous travaillons nos dossiers et nous disons ce qui nous parait positif, sur la gestion du risque inondation par exemple ou sur la base de sécurité civile à Garons. Nous savons toutefois que parmi de très nombreuses annonces, beaucoup ne se réaliseront pas. Rien n’est facile pour faire aboutir des projets, mais la politique de l’Agglo manque de vision sur l’avenir et de dispositions très concrètes pour les habitants. Cela se voit dans le domaine des mobilités, de l’enseignement supérieur, du développement économique et même de l’aménagement du territoire.
Vous évoquez régulièrement la « politique d’affichage » menée à Nîmes Métropole et un « faible taux de réalisation » quant aux projets structurants annoncés. Pourquoi selon vous l’Agglo nous berce « d’illusion » ?
Parce que les finances de Nîmes Métropole ne permettront pas de tout faire et parce que les dispositions législatives comme le « Zéro Artificialisation Nette » nous contraindront aussi à faire des choix. M. Proust peut laisser imaginer qu’il sera capable de tout et impressionner en inscrivant des montants d’investissement très importants dans les budgets, la réalité est plus complexe. Et nous continuons à être vigilants sur le niveau d’endettement qui nous parait encore dangereusement élevé.
La 3ème voie entre la gare de Nîmes centre et la gare TGV Nîmes-Pont-du-Gard, hérésie ou impératif ?
Ce qui est une hérésie, c’est la gare TGV de Nîmes-Pont du Gard. Nous l’avons dit dès le début. Si la nouvelle ligne était nécessaire, notamment pour le fret, la nouvelle gare ne l’était pas. Il était possible de raccorder la ligne classique et la ligne nouvelle pour renforcer la gare de Nîmes-Centre. C’était plus logique en matière de mobilité et moins couteux. Une nouvelle gare aurait pu être nécessaire dans quelques temps, mais pas forcément à Manduel, sans doute davantage à Garons pour un vrai pôle multimodal. Nous payons aujourd’hui un manque de réflexion. Tout le monde aimerait une navette permettant de relier les deux gares de Nîmes, mais la réalité, encore une fois, est que financièrement et en termes d’utilisation des infrastructures, ce n’est pas forcément un bon choix. Ce serait très coûteux et cela viendrait contraindre le développement nécessaire de la gare de Nîmes-centre.
Selon vos informations, le maire de Nîmes envisagerait une rénovation du stade des Costières comprenant une destruction de la tribune ouest. Toujours selon vous, cette rénovation ne permettrait qu’une homologation du stade en National. Un manque d’ambition à vos yeux ?
Un manque d’ambition sans doute qui fait suite à une très mauvaise gestion du patrimoine municipal. La majorité actuelle a été aveuglée par ses dogmes libéraux, ce qui l’a conduit à vouloir vendre le stade des Costières, qu’elle n’avait pas entretenu, au bénéfice d’un projet immobilier privé, en n’ayant aucune garantie. Là encore, nous avions prévenu dès 2019 et nous n’avons eu de cesse d’alerter. Rani Assaf a toujours été clair sur son projet sportif et son modèle économique. La majorité municipale semblait s’en satisfaire et était très méprisante pour ceux, comme nous, qui disaient leurs craintes. Le vent a tourné. Aujourd’hui, la ville ne semble plus être en capacité financière pour rénover le stade. Le maire et son équipe sont responsables de cette situation.
Vous hurlez au « gâchis » que représente la destruction de la médiathèque Marc Bernard située à Pissevin. La même qui a été rénovée à hauteur de 80 % par l’Etat et l’Europe dans le cadre du programme de renouvellement urbain. Les deniers de la municipalité n’ont, par conséquent, pas subi de razzia…
Ce sont quand même des deniers publics ! Il est assez choquant de voir la façon dont la majorité annonce de son propre chef la destruction de la médiathèque sans en parler avec les autres partenaires du NPNRU (Nouveau programme national de renouvellement urbain, ndlr), à savoir l’Etat, le Conseil départemental, le Conseil régional et l’Agglo. Et si la Ville annonce la reconstruction de la médiathèque dans quelques années, on ne sait pas qui va financer cette reconstruction. Quant à la solution présentée comme temporaire d’un lieu d’accueil extérieur, cela reste très insuffisant. La réalité, c’est qu’entre les travaux de rénovation de la médiathèque Marc Bernard, puis sa fermeture pour des raisons de sécurité et le choix de l’abandonner, les habitants de Pissevin auront été privés d’un espace culturel très important pendant de nombreuses années.
Toujours remonté contre le projet du Palais des Congrès baptisé H2 ?
Il ne s’agit pas pas de rejeter nécessairement le principe même mais investir 60 millions d’euros dans cet équipement signifie que ces 60 millions d’euros, et cela risque d’être plus, ne seront pas utilisés pour autre chose. Nous savons que la très grande majorité des palais des Congrès en France peinent à être rentables… Quel coût aura cet équipement, en fonctionnement chaque année, pour la ville ? Et si la localisation en centre-ville peut avoir des aspects positifs, il semble bien, en voyant se construire le palais des Congrès, qu’il soit un bâtiment très massif dans cet espace. Et bien sûr il faudra mesurer les conséquences pour la vie des habitants du quartier. Il y a une logique de tourisme d’affaire, il faut aussi considérer la vie des Nîmois.
La Chambre régionale des comptes a estimé le coût de la gratuité des transports dans la métropole de Montpellier à 42 M€ par an. Nîmes Métropole devrait-elle imiter ses voisins ?
Ce serait bien moins à Nîmes. Mais l’on considère toujours cela comme un coût, on oublie de dire que la circulation des voitures individuelles a aussi un coût, pour les familles comme pour la collectivité. La question est de savoir si l’on considère que le transport collectif doit être un service public gratuit, comme le sont les autres services publics. Nous considérons, au vu des expériences diverses en France, que c’est un des leviers pour favoriser le report modal. C’est bon pour la planète et pour le pouvoir d’achat. Bien sûr cela ne remplace pas la qualité du réseau, des fréquences…Il faut les deux. Il faut sans doute y aller par pallier. C’est un sujet essentiel. On manque d’ambition à Nîmes Metropole.
Les manifestations pour un cessez-le-feu d’urgence à Gaza se succèdent à Nîmes. Qualifiez-vous ce qui se passe en ce moment à Gaza de génocide ?
La situation à Gaza est catastrophique. C’est la Cour Internationale de Justice, elle-même, qui parle de « risque génocidaire ». Des observateurs de l’ONU parlent de « nettoyage ethnique ». Dire cela n’est pas minorer les actes terroristes atroces commis par le Hamas le 7 octobre dernier. C’est reconnaitre l’urgence de la situation pour des centaines de milliers de civils palestiniens et ne pas laisser faire le gouvernement d’extrême-droite israélien. Il faut un cesse-le-feu et que puissent se faire entendre les voix palestiniennes et israéliennes qui veulent construire la paix, une paix qui passe par la solution à deux Etats dans les frontières de 1967. La communauté internationale doit agir.