La gestion des déchets est l’affaire de tous, notamment du porte-monnaie des contribuables. Rencontre avec le vice-président de Nîmes Métropole, Bernard Angelras, délégué à l’Environnement. Pour ce dernier, la gestion n’est pas du « pifomètre » mais relève bien d’une stratégie écoresponsable, « adaptée aux usagers et à leurs besoins ».
InfOccitanie : combien de kg d’ordures ménagères jette un nîmois chaque année ?
Bernard Angelras : un habitant de Nîmes jette 291 kg par an, contre 330 en 2021. La production de déchets, tous flux confondus, représente 600 kg par habitant de Nîmes métropole, par an. Nîmes métropole se situe dans la moyenne régionale et au-dessus de la moyenne nationale. On projette sur 2024 une baisse de 5% d’ordures ménagères au profit d’une augmentation du tri de 10%.
Sur quels calculs repose la TEOM (Taxe d’enlèvement des ordures ménagères ) ?
La TEOM, qui apparait sur l’avis de taxe foncière, est calculée de façon savante. Elle s’applique sur l’assiette fiscale déterminée par les pouvoirs publics, selon la surface, le bâti ou le non bâti, etc. La TEOM, dont le taux est décidé par la collectivité, peut varier de 30 euros par an à plusieurs dizaines de milliers d’euros pour les entreprises par exemple. En moyenne, la TEOM est de 158 euros par an, par habitant de Nîmes métropole. Un point de TEOM équivaut environ à 3,5M€ de recette.
Pourquoi Nîmes Métropole a fait le choix de passer la TEOM de 10,71% à 11,71% en 2021 ?
Nous avons augmenté d’un point car le budget de gestion des déchets ménagers était déficitaire depuis plus de trois ans, engagé sous la précédente mandature. Nous perdions de l’argent chaque année, jusqu’à 2,7M€ par an ! On a soulevé des disparités de fonctionnement. Il fallait prendre le taureau par les cornes pour que le budget soit à l’équilibre. Le directeur des services et ses deux chefs de service sont partis en 2022, nous avons renouvelé l’équipe et fait table rase avec de nouvelles compétences.
Quelle stratégie a été mise en place à votre arrivée ?
Depuis 3 ans, on s’est attaqué au problème de fond en commençant par un audit, puis on a repensé les cahiers des charges avec nos prestataires. Dès février 2023, on a adopté la nouvelle stratégie avec une optimisation du passage des camions par exemple et le déploiement d’ambassadeurs du tri qui sillonnent les quartiers nîmois. J’ai fait la tournée avec eux et je peux vous assurer qu’ils répondent à beaucoup d’interrogations. La gestion des déchets est le troisième plus gros budget de l’Agglo, soit 45M€, dont 20M€ pour le passage des camions.
Pourquoi certains passages de camion ont été revus à la baisse ?
En zone pavillonnaire par exemple, on s’est rendu compte que sur les deux passages par semaine, le premier camion ne tournait pas à sa pleine capacité, le deuxième tournait à vide ! C’est une problématique de coût mais aussi environnementale. Le rejet de CO₂ est élevé, surtout quand le camion monte dans la garrigue avec des virages et des accélérations. Nous avons donc rationalisé la collecte sur une seule journée, au besoin des usagers. Les décisions sont prises suite à des enquêtes de terrain.
Quels sont les objectifs fixés au délégataire Suez pour le marché de la collecte des ordures ménagères de la ville de Nîmes et de la collecte sélective ?
Nous avons mis en place un contrat de performance et donc une obligation de résultats. Trois objectifs ont été fixés : la baisse du tonnage d’ordures ménagères de 15% à horizon 2029 par rapport à 2024 ; un taux de refus au-dessous de 20% – il s’agit des déchets refusés au centre de tri – et enfin l’augmentation de la part du tri de plus de 20% dans le total des déchets. En 2023, on était à 14%, on projette une augmentation de 16% de la part du tri en 2024. Les contrats de Suez pour la collecte des déchets de la ville de Nîmes, et Coved pour les encombrants, représentent au total 71 M€ pour Nîmes métropole, soit 12 M€ par an, jusqu’en 2029.
Pour la collecte des encombrants, la plateforme d’appel était basée à Lyon. Quelle solution a été trouvée pour plus de réactivité ?
En effet, le 0800 420 420 renvoyait à un centre d’appel basé à Lyon. Dorénavant, lorsque les nîmois téléphonent au sujet d’un encombrant, ils ont à faire à un membre qui est au cœur de l’organisation et coordonne la collecte des encombrants, qui représentent d’ailleurs la plus grande part des appels. Les interlocuteurs au téléphone connaissent désormais les quartiers. Par ailleurs, grâce à l’application Mon service déchets, on peut prendre rendez-vous pour les encombrants tout le temps. Sur Nîmes, la collecte se fait 48h après l’appel, hors Nîmes il s’agit d’un système de sectorisation avec une date définie.
Déchets sauvages, d’une certaine manière, êtes-vous impuissant ?
J’aimerais rappeler tout de même que lorsqu’un consommateur achète son frigo, il paie déjà une taxe dite éco-participation qui est censée permettre le recyclage. Au final, le contribuable paie deux fois si l’on inclut la TEOM… Concernant les déchets sauvages, nous faisons de la sensibilisation mais nous n’avons pas de pouvoir de police à l’Agglo, ce sont les maires qui l’ont. C’est très problématique, en plus du fait qu’il faut prendre les gens en flagrant délit.
En juillet, le prix de la tonne incinérée (gestion confiée à Veolia) est passée de 98 € à 40 €. La TEOM sera-t-elle par conséquent diminuée pour soulager les habitants du Sitom sud Gard ?
En effet, l’une des raisons est que l’incinérateur a développé un pôle de chauffage urbain, ce qui lui procure des rentrées financières. Franck Proust, président de Nîmes métropole, a déjà abordé le sujet, on travaille sur la question à minima pour 2025. Il faut voir l’évolution des tonnages. Le vrai sujet, c’est de ne pas baisser pour augmenter après, mais de maitriser totalement la perspective. On ne gère pas à la petite semaine.
Pourquoi avoir arrêté de collecter les ordures ménagères des halles de Nîmes ?
L’Agglo a collecté les déchets des halles de 2011 à 2024, alors que ce sont des déchets professionnels. Lorsqu’on collecte des déchets d’une entreprise, ce doit être des déchets issus de la consommation des salariés sur le lieu de travail, non ceux issus de l’activité économique. On avait carrément des agents dans le local à poubelle des halles ! Règlementairement parlant, nous n’avions le droit. Ce n’est pas à un habitant de Bouillargues de payer la gestion du local à poubelle des halles de Nîmes…
Quelle solution a été trouvée ?
On a prévenu la ville de Nîmes en 2021 pour 2023, soit deux ans avant. On a fait le tour des étaliers afin de les conseiller pour valoriser leurs déchets. Les étaliers ont démarché par la suite des prestataires privés et ont choisi Suez. Franck Proust a surtout plaidé auprès de Suez pour que la société soit le plus à l’écoute et accompagne au mieux cette évolution. Mais le contact entre Vincent Vergne (président de l’association des étaliers des Halles, ndlr) et Suez, était déjà établi.