Après la crise du Covid-19, c’est maintenant au tour de l’inflation de venir s’abattre et chambouler le quotidien et le porte-monnaie des Français. Notamment, les étudiants qui sont la catégorie de la population la plus impactée par cette situation. Rencontre avec des jeunes de l‘Université Paul Valéry de Montpellier.
« Rendez-moi ma bourse ! » C’est le cri que nous lance, Clara, cette étudiante dans le hall d’archéologie de l’Université Paul Valéry. Avec les rangées de platanes et les plantes grimpantes de la cour intérieure, le décor apaisant de la faculté est une apparence trompeuse. Entre loisirs, logement et alimentation, le budget de la jeunesse est rudement mis à l’épreuve. Avec cette forte augmentation des prix due à la récente inflation, les aides perçues par les jeunes ne suffisent plus à pallier ce problème.
Une alimentation chamboulée
«Je saute des repas et mon alimentation est composée essentiellement de pâtes » témoigne Agathe, assisse sur les pavés de la cour intérieure. Comme elle, près d’un jeune sur deux déclare ne pas manger à sa faim. C’est le chiffre alarmant de l’Union nationale des étudiants de France (UNEF) publié à la rentrée 2022. La hausse des prix des denrées alimentaires oblige les jeunes les plus en difficulté à parfois faire des choix dans leur alimentation et à se priver de certains produits plus onéreux. «Ma première année de licence était compliquée, je ne travaillais pas, j’avais juste les aides, explique Matthieu en tirant sur sa cigarette électronique. Les fins de mois étaient ric-rac, je devais faire des concessions. La viande, c’était pour le midi à la cantine, pas le soir chez moi».
D’autres, en dépit de leur budget restreint, essaient de garder une alimentation variée. A l’image de Mélodie, qui se confie sur une note positive : «J’essaie de ne pas manger que des pâtes. Je m’organise pour trouver des plats et cuisiner des légumes, pour que cela ne me revienne pas trop cher».
Logement : des biens rares et chers
« Merci Papa ! », lâche, enjouée, Clara lorsqu’elle évoque les difficultés qu’elle a pu rencontrer pour se loger. « Je peux les remercier, car ce sont mes parents qui paient le loyer » ajoute-t-elle sur une note plus sérieuse. Indispensable pour avoir un cadre de travail sain et correct, se loger est une préoccupation centrale pour la jeune génération. Face à la tension croissante sur le marché de l’immobilier, certains sont contraints de parcourir plusieurs dizaines, voire centaines de kilomètres chaque jour afin de pouvoir étudier. «Je fais tous les jours deux heures de route pour venir. Il n’y a pas de place dans les CROUS. Il y a une liste d’attente infinie. J’ai le temps de finir ma licence avant de trouver un logement ! », s’offusque Alexandre dans le couloir de ce bâtiment de lettre.
Des aides insuffisantes
Le constat est sans appel : avec uniquement les prestations attribuées par l’Etat et sans l’aide de leurs parents, beaucoup de jeunes ne pourraient pas survivre financièrement. Malgré une revalorisation des APL de 3,7%, le porte-monnaie des étudiants n’y trouve pas son compte avec l’inflation qui s’abat. « Je suis échelon 0 bis [plus bas échelon de la bourse], mes parents n’ont pas des revenus conséquents, je perçois seulement 100€ d’aides de l’Etat, c’est clairement insuffisant » lésine Aimie, assise en tailleur. Certains étudiants déplorent un système d’attribution et d’évaluation de la bourse trop fermé, qui ne prend pas en compte assez de critères pour évaluer les revenus donnés aux estudiantins. « On regarde les revenus des parents alors qu’ils ne nous aident pas forcément, dénonce Maya, d’un ton irrité, en agitant sa jambe. Si on a pas nos parents derrière, on peut très clairement finir à la rue ! Comment fait-on pour manger ? ».Ceux en situation intermédiaire regrettent aussi d’être oubliés alors que leur condition ne leur permet pas de vivre sans les aides du gouvernement. « Il y a ceux en très grosse galère et les intermédiaires qui sont juste dans la mouise » explique Clara, qui s’est vue retirer sa bourse le mois dernier.
Trouver des alternatives
D’autres trouvent des solutions alternatives : « Je me fais aider par mes parents, mais quand ça ne suffit pas, je suis sur Discord. Des mecs m’abordent et me paient des trucs sans rien attendre en retour, et je dis oui », raconte Emilie en riant, mais sans vouloir en dire plus. Aujourd’hui, selon une enquête Linkee, 76 % des étudiants ont un « reste à vivre » de moins de 100 euros par mois, soit 3,33 euros par jour, une fois leurs factures payées.