Yanis* ne décolère pas. Habitant de longue date du quartier des Hauts de Massane à Montpellier, il ne cesse de dénoncer l’absurdité d’une structure installée en hauteur d’une colline, s’inspirant du célèbre « Hollywood », avec, en lieu et place, le mot « Coucou ». Outre l’appellation choisie quelque peu simpliste, l’enveloppe dédiée à ce projet marketing a nourri la colère et l’incompréhension du Montpelliérain et de nombreux habitants du quartier, rapporte Yanis.

« Ce Coucou a coûté 66 000 € »

Alors même que certains habitants déplorent un quartier « laissé à l’abandon », Yanis fait les comptes : « Ce Coucou a coûté 66 218€ HT », s’étrangle celui qui inclut les frais d’études, de conception et de travaux. Pour appuyer ses dires, il nous communique une attestation de travaux qui émanerait d’Altemed (fusion de ACM Habitat et du groupe SERM-SA3M), en date de décembre 2024, avec pour objet « NPRU (Nouveau programme de renouvellement urbain) Mosson », mentionnant cette installation contemplative dans le cadre de l’opération « Balcon secret des Hauts de Massane ». Dans ce document figure bien la somme avancée plus haut par Yanis. Contactée par nos soins au sujet du montant de cette structure du « Coucou » et du cadre dans lequel elle s’inscrit, la Ville de Montpellier n’a pas donné suite. Quelques photos ci-dessous :

« Le résultat est disgracieux »

Le même Yanis déplore un coût exorbitant : « Cela fait très cher payé, en particulier pour la partie études à plus de 20 000 euros. Je trouve que le résultat est disgracieux, d’autant plus qu’il a été installé en plein cœur d’une zone naturelle et d’un espace boisé classé. Et faire appel à un cabinet d’études pour aboutir à ça… il fallait oser ». Une dépense « injustifiée », alors même que « nous sommes abandonnés sur tous les plans », souffle-t-il.

Sécurité, propreté, services publics, de l’argent qui aurait été le « bienvenu »

Le même mentionne la sécurité dans le quartier : « aucune amélioration n’est perceptible et les faits graves s’enchaînent : tentative de viol, nombreux cambriolages… Une habitante très âgée a même été ‘visitée’ à trois reprises alors qu’elle était présente chez elle, et a dû se défendre seule ».

La propreté ? « Jamais nous n’avions connu un tel laisser-aller. Le lac des Garrigues, autrefois une fierté du quartier, est aujourd’hui laissé à l’abandon. Seul un habitant bénévole prend encore l’initiative de nettoyer ses abords chaque dimanche matin, avance Yanis. De manière générale, la mairie a réduit les moyens consacrés à la propreté : passages moins fréquents des balayeuses, diminution du nombre de cantonniers et de leur présence sur le terrain. Et lorsqu’on signale un dépôt sauvage à Montpellier au quotidien, il faut insister pour qu’une équipe se déplace. Certes, certains habitants manquent de civisme. Mais tout ne peut pas leur être imputé : il y a une défaillance claire des services municipaux« .

D’autres services publics sont également défaillants de l’avis de Yanis : « La médiathèque est fermée, la piscine Neptune également, ainsi que plusieurs crèches. Résultat : il ne reste presque aucune offre de loisirs ou de services publics dans le quartier. Pour aller à la plage, il faut compter au minimum deux heures de transports en commun, ce qui rend cette sortie inaccessible à beaucoup de familles ». Les espaces de vie ? « Le Square du Soleil n’a de square que le nom : il ressemble davantage à un terrain vague abandonné, qui devient boueux et impraticable dès qu’il pleut ».

Autant de « dysfonctionnements » qui interrogent sur le choix budgétaire de ce Coucou. « Non seulement aucune véritable concertation n’a eu lieu, mais en plus, ces projets sont venus s’imposer au quartier depuis l’extérieur, sans considération pour les habitants. Les riverains de la rue de Sicile se sont d’ailleurs mobilisés contre l’installation du damier rose bonbon devant chez eux, craignant des nuisances et des squats », fait savoir Yanis.

« Le plus grave ? Le manque de concertation »

Adil Sosso habite à la Paillade. Ce militant, anciennement membre du collectif de rénovation du quartier du Petit bard, est du même avis. « Au lieu de ce Coucou qui a choqué beaucoup de monde ici, pourquoi ne pas avoir injecté cet argent du NPRU dans les associations qui manquent cruellement de moyens pour faire leur travail ? », interroge-t-il. Le manque de démocratie ne passe pas : « le plus grave, c’est qu’aucune consultation n’a été faite des Pailladins, ne serait-ce que sur le choix du mot ? Pourquoi « Coucou » ? Pourquoi pas Montpellier ? La Paillade est à Montpellier n’est-ce pas ? ». Contactée à ce sujet, la municipalité de Montpellier n’a pas donné de réponse.

« Le comité de quartier Hauts de Massane n’est pas neutre »

Adil déplore également des insuffisances publiques : « le manque de poubelles au Gémeaux, des écoles dégradées comme Virginia Woolf, l’insalubrité, la voirie dans un sale état »…, égrène-t-il. Il pointe par ailleurs la matière qui compose le Coucou : « plus de 60 000 euros pour une structure… en bois ! Ça ne va pas durer longtemps cette histoire avec les intempéries », fustige-t-il. De manière globale, Adil Sosso est très critique vis-à-vis de l’action du maire M.Delafosse : « ce qui a été décidé dans l’ANRU date de l’époque de Saurel, Delafosse surfe sur ce qui a déjà été fait, il propose quoi lui, concrètement ? L’enveloppe de l’ANRU est passée d’un milliard à 500 millions d’euros et les travaux peinent à se faire voir », conclut-il dépité, avant de souligner : « le comité de quartier Hauts de Massane n’est pas neutre, ils sont en majorité militants au PS, comment voulez-vous que les choses bougent ici ? ».

*Prénom fictif