François Vasquez est l’ancien vice-président de Montpellier Métropole, alors en charge de la collecte, du tri et de la valorisation des déchets et porteur de la politique dite zéro déchet. Il alerte sur les « dangers » de la filière CSR (Chaudière de combustion solide de récupération) en projet sur le site de l’usine Ametyst, dans le quartier GaroSud, porté par le maire-président de Montpellier, Michaël Delafosse.*
InfOccitanie : Pour les lecteurs qui ne vous connaissent pas, pourriez-vous vous présenter ?
François Vasquez : Je suis un écologiste de terrain. J’ai fait de la politique pour transformer mon indignation en action. J’ai commencé à l’âge de 40 ans, je n’avais auparavant jamais milité, je n’ai jamais eu de carte politique. En 2005, j’ai milité pour l’association de riverains de Garosud concernant l’absurdité d’Amétyst, la plus grande usine de tri mécano-biologique (TMB) de France. Mon père travaillait dans les bureaux d’étude concernant le broyage et le compostage. Les déchets, on m’en parle depuis tout jeune. J’ai été porte-parole de douze associations de protection de l’environnement soucieuses des problèmes de santé, comme à la décharge de Castries ou la décharge de Fabrègues finalement annulée. En 2020, j’ai été appelé par « Nous sommes » pour faire campagne à Montpellier.
InfOccitanie : Quel est votre regard sur l’éviction de Manu Reynaud, vice-président de Michaël Delafosse, des Ecologistes (EELV) ?
François Vasquez : Son objectif en 2020, c’était de faire gagner Michaël Delafosse. Il ne se sent pas capable de mener, mais se sent très bien en second. Être inféodé aux socialistes, c’est une bénédiction pour lui, selon moi.
InfOccitanie : Avez-vous des contacts avec René Revol, maire de Grabels et votre successeur depuis votre éviction de la délégation des déchets au sein de la Métropole ?
François Vasquez : non, René Revol n’y connait absolument rien aux déchets, je suis prêt à débattre avec lui quand il le souhaite. Après avoir affirmé plusieurs fois dans la presse que la filière CSR ferait rapidement baisser la TEOM (taxe sur les déchets, ndlr), il a reconnu en conseil qu’elle ne baissera finalement pas. J’affirme qu’elle continuera à augmenter sur les 15-20 ans de la DSP (délégation de service public, ndlr). Le gros problème, c’est qu’il devient la caution de Michaël Delafosse. Il défend la filière CSR alors que LFI est contre au niveau national. Nathalie Oziol (députée LFI, ndlr), devrait se positionner localement à son sujet. Quant à Michaël Delafosse, je suis farouchement déterminé à ce qu’il ne fasse pas un second mandat.
InfOccitanie : Quel bilan faites-vous de votre mandat de 4 ans en tant que vice-président en charge de la gestion des déchets ?
François Vasquez : Une fois élu, je me suis rendu compte que rien n’était possible. Au 1er tour des municipales 2020, j’étais avec les Verts, au second tour, j’ai rejoint la coalition avec Michaël Delafosse à condition que mon engagement sur les déchets soit respecté. J’avais rencontré Michaël Delafosse au quartier des Grisettes, il s’était engagé sur le zéro déchet. Une fois élu, l’ancien directeur des déchets de la Métropole est parti, je me suis retrouvé seul, sans moyen humain suffisant pour mener une vraie stratégie de gestion des déchets, de réduction, de réemploi… J’ai travaillé pendant un an et demi d’arrache-pied avec une personne à faire de la pédagogie autour des composteurs collectifs, à rencontrer les maires, à passer dans les écoles. Michaël Delafosse était exclusivement consacré au tram gratuit.
InfOccitanie : Le contribuable est-il le grand perdant selon vous ?
François Vasquez : Les lobby industriels dans les déchets sont très puissants, sous couvert de créer des emplois. Ce sont eux qui forment les cabinets de conseil qui vont ensuite former les services des métropoles. Une DSP (délégation de service public) signée avec un industriel permet au décisionnaire public de se débarrasser de cette gestion des déchets qui nécessite des outils, de la pédagogie, etc… Sauf que le broyage/compostage s’est transformé en business. Incinérer est plus rentable qu’enfouir. Oui, le contribuable est le grand perdant. A Montpellier, il paie une taxe déchet bien supérieure à la moyenne nationale. Il paie l’inefficacité de l’usine Amétyst…
Infoccitanie : Une unité CSR (combustible solide par récupération) pourrait voir le jour d’ici 2028, à l’intérieur de l’actuelle usine Amétyst. Pourquoi est-ce une « absurdité » selon vous ?
François Vasquez : La fière CSR a besoin de déchets à haut pouvoir calorifique. Sur les 100 tonnes de déchets de la poubelle grise, uniquement 30 tonnes seront mis dans le CSR. Ce que l’on va brûler dans l’incinérateur CSR, ce sera à 70% du plastique ! C’est un aspirateur à déchets qui coûte affreusement cher. N’oubliez pas que pour avoir 30 000 tonnes de déchets CSR, il faut avoir 100 000 tonnes de déchets gris non triés. Vous ne pouvez pas faire une politique de réduction et de tri dans ces conditions !
InfOccitanie : Vous dénoncez également un impact pour la santé
François Vasquez : Michaël Delafosse est coupable au niveau sanitaire de mettre cet incinérateur de 45 000 tonnes de déchets par an en ville, c’est du jamais vu en France. Des milliers de substances toxiques vont se répandre dans la ville au gré du vent. Les fameux PFAS dont on parle beaucoup sont détruits à partir de 1500 degrés environ, le CSR ne montera jamais à cette température. Il faut, par ailleurs, que les 1500 degrés soient atteints dans tous les coins de l’incinérateur, c’est impossible. Ce CSR est un scandale sanitaire, financier et écologique.
InfOccitanie : Des experts scientifiques n’ont-ils pas donné leur avis ?
François Vasquez : Il n’y a pas un médecin qui est venu dire que ce n’était pas risqué. Une réunion avec des cancérologues et médecins était annoncée par Michaël Delafosse, elle n’a jamais eu lieu. Une deuxième réunion aurait dû permettre l’évaluation de manière prévisionnelles des coûts de la filière CSR, idem elle ne s’est jamais tenue.
InfOccitanie : Vous avez débattu avec Michaël Delafosse sur un plateau TV à ce sujet, avez-vous eu des réponses satisfaisantes ?
François Vasquez : Michaël Delafosse est incapable de traiter des choses complexe, il ne peut appréhender que quelques idées simples. Il met en avant l’argument du coût écologique de l’exportation de nos déchets, puisqu’en effet, Amétyst ne trie rien ! Mais le CSR ne changera rien, les 3/4 des déchets continueront à être exportés vers d’autres villes. Tout le monde diminue sa capacité d’incinération, Michaël Delafosse veut faire le contraire. On va dans le sens inverse de l’histoire. C’est insupportable de voir cette bêtise.
*Sollicités via le service presse de la Ville de Montpellier, Monsieur Delafosse et Monsieur Revol n’ont pas répondu à nos questions.