Montpellier : loi Duplomb, la Coordination rurale et les Écologistes autour de la table

Loi Duplomb, souveraineté alimentaire, revenu digne... Les Ecologistes et la Coordination rurale 34 ont débattu ce lundi.
© Linda Mansouri / InfOccitanie. Débat Ecologistes / CR 34, club de la presse Montpellier.

Un exercice présenté comme « inédit », au regard des quelques initiatives infructueuses en France. Côte à côte, le syndicat Coordination rurale Hérault (CR34), défenseur de la loi Duplomb, et les Écologistes EELV 34, portés par le député / candidat à Montpellier en 2026, Jean-Louis Roumégas, ont mis cartes sur table. A la suite des abats, du fumier et des œufs balancés devant la permanence du député de la 1ère circonscription il y a quelques jours par la CR34, une réconciliation était amorcée au Club de la presse, autour d’un débat pour pallier les difficultés de l’agriculture. « Les propos de Sandrine Rousseau n’engagent qu’elle et cela a fait débat au sein des Ecologistes », contextualise le député qui entend bien « sortir de l’opposition stérile métropole/ruralité, écologistes/agriculteurs ».

Echanges entre Jean-Louis Roumégas et Arnaud Poitrine de la CR34. Linda Mansouri / InfOccitanie.

« Rien à péter de leur rentabilité »

« Rien à péter de leur rentabilité », voilà les propos de Sandrine Rousseau ayant mis le feu aux poudres. Arnaud Poitrine, secrétaire général de la Coordination Rurale Hérault, viticulteur à Cabrières, s’insurge : « On ne peut pas entendre ceci, lorsqu’un agriculteur se suicide tous les deux jours en France. Voilà deux ans que je suis au RSA, je ne me tire plus de revenu. On aimerait qu’elle s’excuse. Cette action sur votre permanence n’était pas dirigée contre vous, mais contre ses propos ».

« Une erreur de cible de s’attaquer à nous »

Soit, le débat est ouvert. Jean-Louis Roumégas lance la première salve et l’assure : « les Ecologistes sont sûrement parmi les meilleurs défenseurs des paysans et de l’agriculture ». Et de citer leur combat contre les accords de libre-échange et contre le « lobby de l’agro-industrie ». Le député s’empresse de réaffirmer la ligne de conduite de EELV : « on veut imposer aux produits importés les mêmes normes qu’aux produits Français, y compris dans l’UE. On défend un prix plancher face à la grande distribution qui achète des fois au-dessous des coûts de production ». La souveraineté alimentaire est un cheval de bataille des Ecologistes, un certain protectionnisme est promu, sans pour autant « tomber dans le zéro échange international ».

Quelle responsabilité pour la Métropole ?

La responsabilité des acteurs publics est également pointée du doigt : « les politiques foncières doivent arrêter de manger des terres agricoles, comme Sablassou. Il faut les remettre aux mains des paysans pour favoriser le circuit court », préconise le parlementaire qui appelle à faciliter la commande publique locale. Très vite, le sujet brûlant est abordé : la loi Duplomb, dernièrement votée à l’Assemblée et dénoncée dans une pétition réunissant 2 millions de signataires. « Il n’y a pas que l’acétamipride (insecticide néonicotinoïde que la loi prévoit de réintroduire de façon encadrée, ndlr) dans cette loi, mais les retenues d’eau ou la simplification administrative. Cette molécule est autorisée en Europe, dans tous les cas, les produits entrent en France. Certains agriculteurs se retrouvent dans une impasse technique », insiste Arnaud Poitrine pour la CR34. Les retenues d’eau dans l’Hérault ? « Le Département en a détruit deux il y a vingt ans », souffle dépitée la CR34.

« 200 produits ménagers contiennent des substances dangereuses »

Pour démontrer que des substances « dangereuses » se glissent dans notre quotidien, Arnaud Poitrine dégaine aussitôt de sa poche un diffuseur pour chat et une pipette à mettre sur les félidés. « Ils contiennent aussi des substances cancérigènes, des néonicotinoïdes. Le gamin touche le chat, puis son visage. 200 produits ménagers contienne des substances dangereuses, pourquoi s’attaquer uniquement à l’agriculture ? », interroge la CR34.

Diffuseur pour chat, pipette de traitement contre les puces pour chat.

« On vous reproche de ne pas venir sur le terrain »

« Des agriculteurs en France ont leurs filières de betteraves et de noisettes détruites », déplore Laurent Crouzet, co-président de la CR34 et viticulteur, qui poursuit : « on vous reproche de ne pas venir sur le terrain », à l’adresse du député. Le texte adopté début juillet par le Parlement prévoit des dérogations pour l’utilisation de cet insecticide pour certaines filières qui n’ont pas d’alternatives solides et s’enfoncent dans la crise comme la betterave sucrière et la noisette.

Une « chimie positive » est-elle possible ?

Pour Laurent Crouzet, les Ecologistes manipulent une « peur ». Il argumente : « la chimie est un mot tabou alors que tout le monde l’utilise, cela fait partie de notre quotidien, je suis en faveur d’une chimie positive qui travaille sur l’environnement ». Le même conclut avec un exemple : « le soufre utilisé en agriculture bio tous les jours sort de la pétrochimie, du soufre naturel il n’y en a plus ».

« Qui va contrôler nos voisins européens ? Nous, 17 organismes nous contrôlent ! « 

Christophe Sabatier, secrétaire général adjoint de la CR34, vigneron sous mention « Nature et progrès » fait un constat amer : « depuis 2 ans, le nombre de terre agricoles bio régresse, c’est bien qu’en face, on n’a pas le consommateur. Par manque de revenu, les gens reviennent à du conventionnel. Le problème est dans le pouvoir d’achat ». Appliquer les accords de libre-échange ? « Qui va aller contrôler aux frontières nos voisins européens ? On n’a pas les moyens. Expliquez-moi comment vous faites pour contrôler les produits de la Nouvelle-Zélande ou l’Afrique du Sud. Nous, 17 organismes nous contrôlent ! », s’époumone Christophe Sabatier. Lequel exige « des prix, pas des primes », entendez une meilleure rémunération de l’agriculteur, non des subventions au compte gouttes

La PAC ne convainc pas

Le sujet est complexe et mêle une foultitude d’enjeux. Dont la souveraineté alimentaire, pour laquelle l’élue Coralie Mantion dit s’être battue lorsqu’elle était à la vice-présidence à l’aménagement du territoire, à la Métropole. « La PAC (politique agricole commune, ndlr) représente 40% du budget européen, le mode de distribution ne convient pas aux Ecologistes. Au lieu du nombre d’hectares, elle devrait être versée en fonction du type d’agriculture notamment. Il faut aider à la transition écologique en bio ». La CR34 acquiesce : « on est d’accord pour la PAC, ce ne sont que des papiers et des contrôles supplémentaires, on veut vivre dignement de notre travail, c’est tout ». Laurent Crouzet abonde : « les aides de la PAC sont absorbées par la multitude de couches administratives avant le ruissellement aux agriculteurs… »

« Je suis en fauteuil, je coûte 200 000 euros à la Sécu et la MSA »

« La pétition, les gens l’ont signée sans savoir ce qu’il y avait dedans puisqu’elle n’est pas disponible », affirment en cœur les représentants de la CR34. Ni une ni deux, Charles, ancien viticulteur sur fauteuil roulant, livre son témoignage : « À cause des pesticides, je suis malade. J’ai utilisé de l »arsenic interdit depuis 1973. On n’avait aucun produit de remplacement. Je suis malade depuis 20 ans, je coûte à la Sécurité sociale et à la MSA 200 000 euros par an en produits. J’ai signé cette pétition. C’est faux de dire que les gens ne connaissent pas la loi et ne sont pas avertis ». Charles l’avance, « on n’a rien fait pour supprimer tous ces produits depuis 20 ans ». « C’est faux !, s’étrangle Laurent Crouzet. Vous savez combien de molécules il nous reste pour travailler aujourd’hui ? ».

« On est prêt à financer les agriculteurs pour des compensations »

Jean-Louis Roumegas récupère le micro. Celui qui a présidé le groupe Santé environnement au Parlement, et travaillé à l’Institut de cancer, ne prend pas le sujet à la légère. « L’acétamipride est un perturbateur endocrinien. Sa particularité, c’est qu’il peut agir à des doses infinitésimales et nuit à des individus vulnérables notamment, comme les femmes enceintes, les enfants, où les adultes malades. 1300 chercheurs ont pétitionné et prouvé sa nocivité ». Lequel évoque les « effets cocktails » avec des substances contenues dans les matériaux du quotidien : « si j’analyse votre t-shirt, on pourrait trouver 70 traces de substances préoccupantes. Notre défi collectif est de réduire globalement ces expositions. On peut concilier la santé du consommateur, l’environnement et le revenu des paysans par un autre système économique ». Les Ecologistes se disent prêts à financer des mesures de compensation, « alors préparez-vous car elles coûtent très cher! », lance la CR34.

L’OFB, un « fossoyeur » ?

Quant à l’OFB, l’Office français de la biodiversité (OFB), c’est tout bonnement un « fossoyeur » pour la CR34. qui dénonce des contrôles abusifs et des sanctions injustifiées. « Il ne faut pas exagérer, l’année dernière, ils ont contrôlé 1% des exploitations », pointe le parlementaire. « Mis bout à bout avec les 16 autres organismes qui nous contrôlent, cela fait beaucoup ! », rétorque le syndicat d’agriculteurs. L’échange de deux heures a eu le mérite de crever l’abcès… La suite au prochain épisode. Témoignage vidéo de la CR34 ci-dessous :

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