L’artiste propulsé par Jean-Paul Gaultier cultive son excentricité baignée d’inspirations pop culture. De l’ombre à la lumière.
A peine le pied dans son antre que l’aura de feu Akira Toriyama nous enveloppe. Des dizaine d’aquarelles à l’effigie des personnages iconiques de Dragon Ball Z ornent les murs. Une exposition hommage qui coulait de source pour l’esthète, envahi d’une frénésie créatrice. Armé de ses couleurs, l’artiste a sorti de son imaginaire une collection en un rien de temps, à raison de trois œuvres par jour. « Van Gogh en faisait quatre, la peinture doit être rapide ou ne pas être », juge l’artiste qui peint dans l’instantanéité de ces moments volés.
Un génie du pinceau animé d’une énergie dévorante. Son épouse l’affublera d’ailleurs du surnom « l’imprimante », tant les toiles amoncellent. L’exposition ‘Dragon Ball’, visible jusqu’au 30 avril dans sa galerie Muuse, présente certains posters à quinze euros ou des cartes postales à cinq euros. A côté des peintures à 400€, Patrice Murciano y croit dur comme fer, l’art doit embaumer tous les esprits. Le porte-monnaie ne doit pas être un rempart à l’émancipation des âmes. Il en sait quelque chose, lui qui a été éprouvé par la vie, qui s’est par le passé retrouvé sans domicile fixe, à errer d’incertitudes en désespoir. Le Phénix renait toujours de ses cendres, sa côte d’artiste se jauge aujourd’hui à 12.000€ le 120 × 120 cm
La femme, sa muse…
A Saint-Jean-de-Védas, Patrice Murciano accepte de jeter un coup d’œil dans le rétroviseur. Son identité visuelle se distingue par le fond blanc et l’explosion de fragments ‘flashy’ qui s’y posent. Des courbes féminines, des animaux, des crânes et autres sujets forment la narration d’un Murciano. Les férus le reconnaissent au ‘gribouillisme’, ces lignes de construction que l’artiste laisse transparaitre sur l’œuvre finale. Des airs de Leonard De Vinci… Patrice Murciano s’émerveille des femmes et de leur poésie. Autodidacte, il plonge à 6 ans, sans feutre ni peinture, plutôt avec le rouge à lèvres de sa maman. « Il y avait une odeur féminine sur mes dessins, j’ai toujours été attiré par la femme, j’ai cette sensibilité féminine », expose-t-il. Des courbes rondes et fermes, des ombres et des lumières viennent magnifier le corps féminin.
« Anarchiste libertaire »
Un « anarchiste libertaire » comme il se définit. Dénonciateur, il s’aventure sur des terrains minés. A l’image de cette femme nue crucifiée qu’il propose sur la toile. Une « provocation » qui a remué nombre de catholiques, justifiée par la « dénonciation des souffrances des femmes à travers le monde ». ‘Liberté’ tatoué sur sa poitrine, Patrice Murciano épouse le dogme du bien et du mal, du libre arbitre, sans pour autant « adhérer à une religion ni à un parti ». « Ni Dieu ni maître », nous souffle celui qui prodigue le bien sans l’existence d’un quelconque carcan autoritaire. Preuve en est, l’esthète ne compte plus ses œuvres mises aux enchères au profit de personnes sans domicile fixe, de personnes âgées en Ehpad ou d’enfants cancéreux. Patrice Murciano « s’auto-régule, s’auto-juge, un peu comme Gainsbourg et Coluche ».
« Un des plus beaux cadeaux de ma vie »
Un chevalet avec toile et peinture lui sont offerts étant enfant. « Un des plus beaux cadeaux de ma vie », se souvient il. Le jeune Patrice est différent de ses frères et sœurs, il déambule dans les musées, contemple Rembrandt, Delacroix et l’impressionnisme. Fort de son style hyperréaliste, l’artiste bascule dans la photographie, puis le ‘courbisme’, clin d’œil aux courbes de la femme, mélangé au cubisme. Il expose à 29 ans à New-York, en 1998. Une harmonie se crée entre les couleurs du courbisme, l’hyper-réalisme et le gribouillisme. Surtout, ses œuvres s’imprègnent de la narration pop culture omniprésente. « J’adore Goldorak, Retour vers le futur, David Bowie, Tim Burton, Star wars et Mickey », liste l’artiste tatoué a l’effigie de Catwoman.
La pop culture en reine
Son domaine de prédilection ? La technique mixte sur toile, à base de peinture, d’acrylique, de crayons de couleurs, d’aquarelle… Un mélange de matières qui nourrit la richesse de ses œuvres. A l’occasion de Joker 2 prévu en fin d’année, Patrice Murciano suit ses lubies. L’artiste recherche un manoir dans lequel installer une exposition Gotham… La Batmobile devrait être de la partie. L’actualité est dense, une vente aux enchères au profit de malvoyants, une exposition à Miami en mai prochain… « La technique peut s’apprendre, pas la créativité, ce petit grain de folie », estime l’artiste.
Une bouteille à la mer
Tout part d’une « bouteille à la mer ». En 2012, Patrice Murciano se décide à envoyer un autoportrait à Jean-Paul Gaultier. Le même qui le recevra quelques jours après lors de son défilé Printemps Été collection 2013. « J’étais assis entre Catherine Deneuve et Josiane Balasko », narre-t-il. Le couturier, sensible à son art, lui propose d’exposer au cœur de son expo ‘De la rue aux étoiles’, à New-York, puis à Londres et Paris. « C’est marrant, les signes de la vie, j’étais dans la rue, et inconsciemment, je montais vers les étoiles », métaphorise-t-il. Florent Pagny écrira par la suite la préface de son livre. Puis place à Dieter Wiesner avec qui il se lie d’amitié. L’homme n’est nul autre que l’ancien manager du légendaire Michael Jackson. Patrice Murciano se livre en ce moment à l’écriture d’une fiction mettant à l’honneur la conscience artificielle plutôt que IA. Un projet raccord avec les questionnements existentiels de l’artiste… Le contacter : [email protected]. Adresse :95 All. Pierre Lazareff, 34430 Saint-Jean-de-Védas.