Afin d’institutionnaliser ses engagements sociétaux, ‘Un toit pour tous’ a fait évoluer ses statuts pour obtenir la qualité de ‘Société à mission’, devenant ainsi le premier bailleur social à franchir le pas sur le territoire de l’ex Languedoc-Roussillon. Interview.
En complément, un fonds de dotation est en cours de création pour accompagner financièrement des jeunes porteurs de projets. « On le faisait déjà sur le quartier Pissevin au plus fort de la crise en 2023, pour apporter l’art et la culture au plus près de nos résidents, on souhaite désormais le structurer », indique Jean-Marie Garabedian. Voilà bientôt trois ans que ce dernier est à la tête de la SA Un toit pour tous. Le parc locatif est conséquent, 11.000 logements, dont 8500 dans le Gard, 2500 dans l’Hérault, pour un total de 20 000 personnes logées. C’est à Nîmes qu’est créé ‘Un toit pour tous’, par la CCI du Gard il y a 55 ans. Le bailleur est filiale du groupe Habitat en Région, opérateur d’immobilier social des Caisses d’Epargne, groupe BPCE.
25M€ consacrés au parc de logements
En 2023, 25M€ ont été consacrés à l’entretien du parc de logements, à la réhabilitation, ainsi qu’à la livraison de nouvelles résidences. Le modèle économique repose sur du recours au financement long terme auprès de la Banque des territoires (Caisse des dépôts). « Cela nous permet d’étaler nos financements », explique Michel Cavaillon, directeur général délégué, allégeant ainsi la charge de l’emprunt pour proposer des loyers modérés. L’offre d’Un toit pour tous se compose prioritairement de locatif social (logement individuel et collectif) mais également d’habitat spécifique : logement étudiant, résidence autonomie pour seniors, logement pour personnes en situation de handicap. La société propose aussi toutes les offres d’accession : vente HLM, Prêt Social Location Accession (PSLA) et prochainement le BRS (Bail Réel Solidaire) porté par Solenterra, Organisme Foncier Solidaire (OFS) d’Un toit pour tous. Quatre agences maillent le territoire (Nîmes, Montpellier, Bouillargues, Alès) pour 150 salariés. A noter, le bailleur affiche son ambition de production neuve de 250 logements par an et 2 000 logements réhabilités d’ici 2026.
« Un modèle économique à réinventer »
Comment aborder ‘Un toit pour tous’ sans évoquer la crise inflationniste et le prix des matériaux. « Le même projet nous coûte 20 à 30% plus cher qu’en 2020 », déplore Jean-Marie Garabedian. A cela se rajoute la rareté du foncier et les contraintes d’un « millefeuille règlementaire ». La loi ZAN (Zéro artificialisation nette) vient amplifier la difficulté à pouvoir lancer de nouveaux programmes. Enfin, le niveau des taux financiers altère significativement les conditions d’emprunt. « Pour un même projet, le coût du financement est désormais six fois plus cher en charge d’intérêt qu’il y a deux ans », alarme le directeur général. Tout l’enjeu réside donc dans l’amortissement de ces charges d’intérêt et des coûts croissants des matériaux. « Nous avons très peu de variables pour amortir notre modèle contraint, si ce n’est un pilotage rigoureux de notre compte d’exploitation », explique Jean-Marie Garabedian.
« Nos actions sociales ne sont pas suffisamment valorisées »
Plus que de loger des habitants, le bailleur revêt un rôle social à part entière. ‘Un toit pour tous’ a initié son pôle social de sept personnes il y a deux ans. « Nos actions sociales ne sont pas suffisamment valorisées», regrette Michel Cavaillon, soulignant le panel de services d’accompagnement aux locataires, telle que la médiation. Ce même pôle est à l‘origine de 1300 diagnostics réalisés auprès des locataires de plus de 75 ans qui souhaitent un accompagnement adapté au maintien à domicile. « Plus de 200 logements ont été mis aux normes depuis deux ans, 10% des locataires ont plus de 75 ans dans notre patrimoine », poursuit Jean-Marie Garabedian. Le bailleur porte par ailleurs une politique volontariste en matière de rénovation énergétique, 75% du parc locatif présente une étiquette énergétique A, B ou C. « Nous avons très peu d’étiquetage F ou G, contrairement au secteur privé », pointe Michel Cavaillon.
‘Le Fil d’Ariane’, une première dans le Gard
Preuve de son engagement en faveur d’un logement pour tous, ‘Un toit pour tous’ a inauguré en 2023 la toute première résidence accueil du Gard permettant de loger des publics présentant des troubles psychiques. Le bailleur a mené le projet immobilier Le Fil d’Ariane à Nîmes (2,6 millions d’euros) avec le soutien, à hauteur de 600 000 € de l’Etat, de la Région, du Département et de la Ville. Porté par trois associations, Inter’Aide, l’association Educative du Mas Cavaillac et l’UNAFAM, Fil d’Ariane apporte aux 22 résidents l’autonomie tout en leur garantissant un accompagnement adapté.
L’enjeu est de « dédensifier »
C’est également dans le renouvellement urbain Nîmois qu’Un toit pour tous est pleinement engagé. « Le modèle architectural qui date de plus de 40 ans a montré ses limites. L’enjeu n’est pas de fuir ou de quitter un territoire, mais de le dédensifier », juge Jean-Marie Garabedian. Raison pour laquelle beaucoup de programmes du bailleur se limitent à 20 à 30 logements maximum. Evènement phare, la déconstruction de la tour Pollux (118 logements à Pissevin) qui a débuté à l’été 2023. Financé à 80% par l’ANRU (Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine), et 20% par ‘Un toit pour tous’, le projet nécessite une enveloppe de 7,5M€. « Nous avons reconstitué 180 logements en contrepartie des démolitions, dans Nîmes et son agglomération », précise le directeur général. D’autres programmations de « dédensification » sur Nîmes seront prochainement lancées ainsi que plusieurs réhabilitations (résidence Le Vulcain dans le quartier du Chemin Bas d’Avignon, 133 logements) .