Voilà deux mois que Melynda Maufroid a pris les rênes de la Mission locale Jeunes Nîmes Métropole (MLJ). La nouvelle directrice nous livre le cap stratégique de cette structure qui a accompagné 5 613 jeunes de 16 à 25 ans en 2023.
InfOccitanie : Quel est votre parcours ? Melynda Maufroid : Cela fait vingt-sept ans que je suis dans le management. J’ai commencé ma carrière dans un organisme de sécurité sociale, sur des postes d’encadrement en Paca et en Occitanie. J’ai travaillé par la suite dans un groupement privé d’Ehpad, en développement des ressources humaines à Paris. J’ai intégré le réseau des Missions locales en 2013, avec un premier poste de directrice de la Mission locale Rhône Argence d’une trentaine de salariés, à Beaucaire, de 2014 à 2021. J’ai été par la suite directrice opérationnelle de la Mission locale Montpellier Métropole, la 4e de France avec 180 salariés. J’ai intégré la Mission locale jeunes de Nîmes Métropole le 2 février 2024.
Quelles sont les missions de la MLJ de Nîmes ? Notre ADN est d’accompagner les jeunes de 16 à 25 ans qui sont sortis du système scolaire. Un jeune ne peut pas (ré)intégrer le marché de l’emploi rapidement si les freins périphériques n’ont pas été levés, notamment en matière de santé, de logements, etc. Pour ce faire, la MLJ Nîmes Métropole crée des ponts avec tous les acteurs locaux afin de multiplier les relations partenariales.
Au moment d’intégrer la MLJ Nîmes, vous avez connaissance du déficit global cumulé d’1.274.000€, du licenciement du directeur et de la démission de la présidente. Est-ce un challenge pour vous que de remettre la structure sur de bons rails ? Je suis très impliquée sur mon territoire, je travaillais déjà en proximité avec la MLJ Nîmes Métropole lorsque j’étais à Rhône Argence. Je suis soucieuse que la MLJ garde toute sa place auprès des jeunes car j’ai une forte notion de service publique de par mon parcours. J’ai postulé en toute connaissance de cause puisque les 27 Missions locales d’Occitanie sont en réseau. Je travaille avec l’idée qu’une Mission locale est membre du service public de l’emploi et à ce titre ne peut pas disparaitre, les Missions doivent perdurer et se renforcer.
Un tour de table financier a pourtant eu lieu. Etat, ville de Nîmes, Nîmes Métropole et Région Occitanie ont permis de constituer un fonds de sauvegarde exceptionnel d’1 050 000€. Un fonds qui n’a visiblement pas été suffisant… L’abondement n’a servi qua résorber une partie du déficit. La feuille de route aujourd’hui consiste à retrouver un taux de masse salariale autour de 75% du budget de la MLJ de Nîmes. Le travail est à conduire en 2024 et 2025. La problématique de pilotage d’une ML réside dans la vision à court terme dont elle dispose. Il est compliqué de se projeter, de faire du prévisionnel sur un exercice ou deux car nous sommes tributaires de la fluctuation des politiques publiques. Sans compter la dernière annonce du gouvernement d’un plan d’économies de 10 milliards d’euros, via le ministère du Travail notamment…
Pourquoi la MLJ Nîmes s’est retrouvée avec un déficit si profond ? La réponse n’est pas si évidente que ça, il y a de multiples causes et des raisons comptables. Afin de répondre à la sollicitation de l’Etat dans le cadre du Plan de relance, toutes les ML de France, et notamment celles d’Occitanie, ont connu une forte croissance. Cela a commencé dès 2015 avec la prise en charge de la Garantie jeune. Les objectifs assignés aux ML ayant doublé, elles ont dû recruter davantage de conseillers pour répondre à la demande. C’est une des raisons de la croissance rapide de la MLJ Nîmes. Cette dernière était à 97 salariés en janvier 2022, 108 en janvier 2023 et 116 en juin 2023. A ce jour nous sommes à 90 salariés.
Il était en question d’un plan de sauvegarde impliquant la suppression de 17 emplois il y a quelques semaines. Où en êtes-vous aujourd’hui ? Justement, il y a eu du changement. Un premier plan prévoyait en effet de réduire la masse salariale, un des premiers leviers d’action pour retrouver un taux plus acceptable. La feuille de route prévoyait le départ prévisionnel de 17 salariés. A ma prise de poste, il y a eu beaucoup d’allers-retours avec la direction et la gouvernance. Nous avons examiné toutes les solutions possibles et analysé finement les postes de charge. Il y a eu des réductions en termes de loyers par exemple. L’idée était de ne surtout pas travailler en mode « dégradé » mais de façon à couvrir l’essentiel de nos missions. Après réflexion et croisement des données, nous avons convenu d’un petit licenciement collectif de 9 postes, dont notamment une non reconduction des CDD. Cela nous permet de mettre en place une organisation cible afin de garantir l’atteinte de nos objectifs et la qualité des missions au service des jeunes.
Quel cap stratégique allez-vous impulser ? Il faut une organisation qui permette d’assurer le squelette de la MLJ et d’asseoir toutes les fonctions support nécessaires au pilotage de l’activité. La MLJ doit être redimensionnée sur son territoire afin de renforcer sa mission principale qui est d’agir pour l’insertion socio-professionnelle des 16/25 ans. Pour ce faire, nous allons retravailler le cœur de nos missions dans le cadre d’un fonctionnement lisible de l’interne comme de l’externe. Par ailleurs, dans le cadre de la loi pour le Plein emploi 2025, les ML sont membres de droit du futur ‘Réseau pour l’emploi’. Nous devons nous y préparer afin de porter la parole de nos bénéficiaires.
Les salariés avaient manifesté en 2023 en raison du plan de sauvegarde d’alors. Sont-ils un peu plus rassurés aujourd’hui ? Une structure restée si longtemps sans direction, cela reste évidemment anxiogène. En effet, nous pouvons dire que nous « limitons les dégâts » en passant d’une volumétrie de 17 à 9 départs prévisionnels. Ceci-dit, cela reste impactant pour les salariés, il y a tout un travail de communication internet à mettre en place.
La MLJ Nîmes est-elle financée à hauteur du nombre de jeunes qu’elle accompagne ? Nous glissons petit à petit d’un financement socle à des financements spécifiques. Nous percevons ces derniers dans le cadre du Contrat d’engagement Jeune (CEJ). En vigueur depuis mars 2022, il remplace la Garantie jeunes et inclut un accompagnement financier. Le jeune s’engage en retours à être en action entre 15h et 20h par mois, au travers de recherches d’emploi ou de formation. La MLJ de Nîmes métropole a un objectif de 1 285 jeunes accompagnés dans le cadre du CEJ en 2024. C’est donc tout un travail d’équilibriste que nous menons afin de maintenir une organisation qui permette de respecter nos objectifs et d’accompagner nos jeunes.